Ce consentement, je n’étais pas vraiment sûre d’avoir très envie de le lire. J’ai horreur du misérabilisme et j’avais peur qu’en plus il ne se teinte de voyeurisme.
Poussée par une amie qui assurait que, OUI, il fallait absolument le lire j’ai tourné la première page et je n’ai pas pu le lâcher.
Un dandy-pédophile protégé
Un père absent, une mère immature et complaisante, une société hypocrite dans laquelle entraver la liberté des mœurs était un pire crime que de regarder sans rien dire et une toute jeune fille qui croit encore aux contes de fées voilà toutes les cartes posées. Quand V. rencontre G. elle est subjuguée par cet homme brillant, célèbre et très vite elle tombe sous son emprise. Aux mains de ce pervers narcissique, V. est une proie idéale et très vite, elle échange un corps vierge et innocent contre une illusion de tendresse et d’amour …
Un prédateur adulé par un cercle littéraire puissant et protégé par l’intelligentsia bohême parisienne, des professeurs fermant les yeux, des policiers incompétents et un président de la république garant d’une drôle de moralité, Vanessa Springora décrit avec une effroyable lucidité les dérives d’une partie de la société française dans les années 80. Chaque mot semble pesé et mesuré, placé avec légèreté pour peser encore plus lourd.
De l’enfant à l’écriture libératrice
Et pourtant Vanessa Springora réussit l’exploit de ne pas surfer sur la vague #metoo, ne règle pas de comptes, ne cède à aucune pression et publie un livre sans une once de voyeurisme qui fait froid dans le dos car cela reste une histoire abjecte et vraie, une vie brisée … et combien d’autres ?
Ce livre est bien plus qu’un simple témoignage, à travers chaque pas ce sont presque 30 ans de douleurs qui affleurent, 30 ans de combats, de chutes et de rechutes. « Chacune de ses parutions, quel que soit le contexte dans lequel [elle] les découvre confine au harcèlement. Pour le reste du monde, c’est un battement d’ailes de papillon sur un lac paisible, pour [elle] c’est un tremblement de terre, des secousses invisibles qui renversent toutes les fondations, une lame de couteau plantée dans une blessure jamais cicatrisée, cent pas en arrière dans les progrès qu'[elle] croit avoir fait dans la vie ».
Découpé en 6 chapitres au titre fort, « L’enfant » à « L’écriture » en passant par « l’emprise » puis « l’empreinte », ce texte résolument à part résonne de comme un coup de tonnerre. C’est un beau livre, élégant, difficile et poignant
Merci et bravo Madame Vanessa S.
10 Comments
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29 mars 2020 at 18 h 46 minVotre critique donne envie de lire ce livre qui fait l’effet d’une bombe dans le milieu littéraire. Nous avons vu l’émission « La grande librairie » qui lui est entièrement consacrée. L’heure des comptes a sonné car cet ouvrage remet en question de nombreuses complicités. C’est certes très tard mais il y a une réelle pris de conscience.
Laurence
21 avril 2020 at 15 h 37 minOui mais il n’est jamais trop tard … et même si je suis absolument contre le fait que les réseaux sociaux servent de tribunal sans autre forme de procès, il faut bien avouer que cela a largement contribué à libérer la parole.
yuko
29 mars 2020 at 21 h 09 minJe te rejoins parfaitement sur ce livre qui a été une vraie claque quand je l’ai découvert. Comme toi, je crains toujours le voyeurisme dans ce genre de littérature mais en lisant ce livre puis en écoutant Vanessa Springora dans les médias, sa délicatesse, son courage…on ne peut qu’être glacés par le cynisme de cette situation. J’ai beaucoup apprécié la dénonciation de la société dans son ensemble et non seulement celle d’une situation individuelle. Une oeuvre que je crois nécessaire et que je suis en tout cas « ravie » d’avoir découvert. Belle soirée à toi Laurence et bon courage pour cette période de confinement (aussi sans vélo.. 🙁 )
Laurence
21 avril 2020 at 15 h 40 minOui, j’ai mais du temps à lire son livre après avoir écouté LGL et du coup, j’ai été bluffée deux fois !!
Côté confinement ça va bien. J’ai trouvé ma routine et là, je suis enfin en congés. Ces 5 semaines de télétravail m’ont achevée. J’avais remplacé mon temps de transport contre du temps de travail (snif mon vélo me manquait doublement) et puis à deux à la maison c’est repas deux fois par jour, j’avais moins de temps qu’avant !!! A très vite Yuko, je t’embrasse !
Une Porte Sur Deux Continents
30 mars 2020 at 17 h 36 minJe retiens ta suggestion, peut-être pour plus tard. Prends bien soin de toi, bises.
Laurence
21 avril 2020 at 15 h 41 minJe crois qu’il faut être prêt pour lire ce livre qui est un très beau livre, malgré un sujet si grave ! Prends soin de toi aussi. Bises 🙂
chiffonsandco
1 avril 2020 at 16 h 51 minje suis plutôt dans des lectures de développement personnel en ce moment ….
Laurence
21 avril 2020 at 15 h 43 minAh, moi aussi, c’est très compliqué en ce moment côté boulot alors si tu as des lectures à me conseiller je suis partante. J’écoute de super podcasts grâce à tes bons conseils !! Bises
Koalisa
4 avril 2020 at 15 h 27 minJe ne pense pas le lire car j’essaie de limiter le stress surtout en ce moment mais je suis remplie d’admiration pour Vanessa Springora ! J’espère que tu vas bien, bisous Laurence.
Laurence
21 avril 2020 at 15 h 44 minMerci Isabelle, oui ça va ! Je suis en congés et su coup je souffle un peu. Ce livre se lit vraiment très facilement alors quand ce sera le bon moment, n’hésite pas ! J’espère que toi aussi tu vas bien … Bises